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EMPREINTE D’UN ATELIER

 

Un atelier est un lieu de circulation, de pensée, d’action, de réaction, un espace clos mais qui porte en lui un principe d’ouverture. L’atelier conditionne l’œuvre (par sa taille, sa disposition spatiale, sa luminosité..). Dans un atelier, le travail qui s’y trouve est d’office in situ, c’est dans un second temps, lors de l’exposition du même travail, qu’il perd sa valeur in situ (même si son format, sa facture en restent l’empreinte).

 

Je propose ici un travail doublement in situ. Je suis invité à intervenir, œuvrer dans cet atelier. J’œuvre in situ dans un atelier (où le travail par principe y est in situ). Ce que je montre ne peut sortir du lieu, il fait lieu. Il déforme l’espace. Il est régi, délimité, produit par l’espace. Le travail (dans l’atelier) fait œuvre (dans l’atelier).

 

Dans ce travail, je me suis axé sur l’idée de prendre l’empreinte de l’atelier. Outre les murs et les oeuvres, je pense que la surface la plus marquée d’un atelier est le sol. Je vais prendre l’empreinte du sol. Qu’est ce qu’une empreinte ? Qu’est ce qu’un sol ? Qu’est ce qu’une empreinte d’atelier ? 

Pour ma part, l’empreinte serait la marque, la trace, d’un élément, d’une chose, d’un objet, sur un support. Qu’est ce qu’une marque ? Une trace ?… Ce serait le dessin. Un support ? L’espace. Ici l’espace va dessiner.

 

In situ, en fonction du lieu, mais aussi du temps. Le fait que ce lieu soit un atelier m’oblige à intervenir dans de brefs délais. Oblige à réduire fortement le temps de l’exposition. Ces paramètres interfèrent beaucoup sur l’œuvre, sur son esthétique (ou plutôt son inesthétique). Il ne s’agit pas pour moi de peindre, mais d’intervenir. Je parlerai de mise en œuvre. Un chantier dans l’atelier.

 

Une mise en œuvre :

 

Je déroule de longues bandes de papiers blancs au sol. La première difficulté est de les dérouler sans bouger le moindre objet (table, chaise, meuble…). Ces objets font partie du sol, ils occupent un espace particulier au sol. Pour les éviter je suis obligé de déchirer ma feuille, de la froisser et enfin, de la plier. Je me faufile entre les pieds de table, de chaise, je contourne les obstacles, ou plutôt je tourne autour. Ceci produit de la déchirure (à la main, moins précise, plus vivante). Les objets occupant une parcelle du sol m’obligent à plier certaines parties du papier (le morceau de papier qui devrait être sous le pied de chaise est rabattu tout autour). Ces replis viennent recouvrir eux-mêmes le support.

 

Une fois le sol couvert de papier, à l’aide d’un pinceau moyennement large, je le recouvre (le papier) de gouache noire. Encore une fois, il ne s’agit pas ici de peindre, mais de recouvrir une surface pour en prendre l’empreinte. Une fois la surface complètement recouverte et sèche, je découvre le sol. Je tends le dessin sur une structure en bois (châssis), je tente de le rabattre contre le mur. Tout est monté sur place, il n’y a aucun moyen de faire sortir ni rentrer le travail de l’atelier. Il n’est pas possible de le retourner. Le sol disparaît sous son empreinte (où il apparaît). Les plis produits par les objets au sol, une fois déployés, produisent des taches blanches par endroits. Ces taches révèlent une certaine disposition des objets sur le sol. Ces tâches sont empreintes, elles créent de la rupture sur le support, du dessin. 

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